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30 janvier 2014

La clause de non concurrence et le cumul des qualités d’associé et de salarié

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La souscription d’une clause de non-concurrence par un associé ou actionnaire d’une entreprise qui est également salarié de cette même entreprise est une situation source de multiples questionnements pour les praticiens.

Il arrive en effet qu’en poursuivant certaines opérations, une personne souscrive des clauses de non-concurrence à différents niveaux : au niveau d’une cession ou d’une acquisition de parts sociales ou d’actions, agissant par exemple en sa qualité de dirigeant, et au titre de son contrat de travail, en sa qualité de salarié.

Ce type de situation s’est présenté récemment à la Cour de cassation qui, depuis 2002 exige une contrepartie financière lorsqu’une telle clause pèse sur le salarié, le défaut de contrepartie étant sanctionné par la nullité de ladite clause.

En effet, dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt du 8 octobre 2013, une société X avait acquis en février 2007, l’intégralité des droits sociaux représentant le capital d’une société Y. A cette occasion, les associés de la société cédée avaient signé une clause de non-concurrence dans un protocole d’accord. Trois mois après la cession, l’un des cédants devenait salarié de la société Y et signait ainsi « en cette qualité », une seconde clause de non-concurrence, moyennant, cette fois-ci, le versement d’une contrepartie financière.

Après trois ans d’exercice, le salarié quittait son travail après avoir été libéré de la clause de non-concurrence prévue aux termes de son contrat de travail, et créait une société exerçant une activité identique à celle de la société Y.

Se prévalant de la violation de la clause de non-concurrence contenue dans le protocole de février 2007, la société X faisait assigner le cédant et sa nouvelle société en vue d’obtenir la cessation de son activité et l’indemnisation du préjudice subi.

Se posait alors à la juridiction suprême la question de savoir dans quelle mesure fallait-il exiger une contrepartie financière lorsque la clause de non-concurrence pèse sur un actionnaire devenu par la suite salarié de la société..

Dans un attendu de principe, la chambre commerciale de la Cour de cassation affirme d’une part qu’ « une clause de non-concurrence prévue à l’occasion de la cession de droits sociaux est licite à l’égard des actionnaires qui la souscrivent dès lors qu’elle est limitée dans le temps, et dans l’espace et proportionnée aux intérêts légitimes à protéger » et, d’autre part que « sa validité n’est subordonnée à l’existence d’une contrepartie financière que dans les cas où ces associés ou actionnaires avaient, à la date de leur engagement, la qualité de salariés de la société qu’ils se sont engagés à ne pas concurrencer ».

La Cour de cassation juge que, bien qu’elle ne prévoyait pas de contrepartie financière, la clause de non-concurrence stipulée dans le protocole de cession d’actions était valable dans la mesure où le cédant avait uniquement la qualité d’actionnaire à la date à laquelle il avait pris l’engagement de non-concurrence.

Malgré cette position adoptée par la Cour, des incertitudes liées au cumul des qualités de salarié et d’associé demeurent en ce qui concerne les clauses de non-concurrence. En effet, rien dans cet arrêt ne permet d’affirmer que la seule qualité de salarié soit de nature à dominer totalement la relation juridique. Cependant, lorsque les qualités de salarié et de dirigeant sont acquises simultanément ou que celle de dirigeant est acquise postérieurement à celle de salarié, il conviendra de respecter l’exigence de contrepartie financière imposée par cette qualité.