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7 janvier 2022

Annulation du forfait-jours : sur la base de quelle rémunération doivent être calculées les condamnations de rappels d’heures supplémentaires ?

La Cour de cassation a précisé les modalités de calcul du rappel de salaire pour heures supplémentaires en cas d’annulation du forfait-jours.

Faits et procédure : une salariée signe, lors de son embauche, un contrat de travail contenant une convention de forfait annuel en jours.

Suite à la rupture du contrat de travail, elle saisit le Conseil de prud’hommes afin, entre autres, d’obtenir l’annulation de cette convention, et ainsi réclamer un rappel d’heures supplémentaires.

Pour rappel, en application des dispositions du Code du travail, les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de la durée légale ou conventionnelle de travail. Elles sont rémunérées en prenant comme base le salaire brut, auquel il faut ajouter une majoration.

En l’espèce, les juges du fond prononcent la nullité de la convention de forfait, et condamnent l’employeur à payer à la salariée un rappel de salaire au titre des heures accomplies au-delà de la durée légale du travail, en prenant comme base son salaire brut perçu.

L’employeur, lui, soutenait que la rémunération initialement fixée, par hypothèse, constituait la contrepartie du forfait annulé. Compte tenu de l’annulation prononcée, l’employeur estimait que le juge ne pouvait prendre le salaire perçu entre contrepartie du forfait comme base du calcul du rappel d’heures supplémentaire. Il demandait donc au juge de prendre comme base le salaire minimum prévu par la Convention collective.

L’argument n’était pas dénué de toute pertinence, puisqu’en pratique les salariés au forfait jours se voient proposer des salaires plus élevés en contrepartie de la durée du travail ces forfait impliquent (dans les faits ces salariés travaillent au-delà de 35 heures par semaine). D’ailleurs, plusieurs conventions collectives (l’on songe notamment à Syntec) prévoient une majoration du salaire minimum conventionnel pour les salariés soumis à un forfait annuel en jours.

Débouté de ses demandes, l’employeur se pourvoit en cassation.

Décision : Dans un premier temps, la Chambre sociale de la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel ayant jugé que la convention de forfait en jours devait être privée d’effet, ouvrant donc le droit pour la salariée de réclamer le paiement d’heures supplémentaires.

Concernant le salaire à retenir pour le calcul du rappel d’heures supplémentaire, là aussi la Cour valide le raisonnement de la Cour d’appel : « la cour d’appel a retenu à bon droit que, la clause de forfait en jours étant nulle, la salariée pouvait prétendre à ce que les heures accomplies au-delà de la durée légale du travail soient considérées comme des heures supplémentaires et rémunérées comme telles, avec une majoration portant sur le salaire de base réel de la salariée, et que l’employeur n’était pas fondé à demander que la rémunération soit fixée sur la base du salaire minimum conventionnel ».

Conclusion : Dans l’hypothèse d’annulation d’un forfait annuel en jours, peu importe que le salaire versé au salarié vienne compenser la sujétion supplémentaire que constitue la conclusion dudit forfait. C’est ce salaire survalorisé, et non le minimum conventionnel, qui doit être retenu par le juge pour calculer le rappel d’heures supplémentaire.

Double peine pour l’employeur donc !

Décision : Cass. Soc., Chambre sociale, 17 novembre 2021, 19-16.756, Publié au bulletin