Rupture conventionnelle et contrôle du consentement du salarié
La signature de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail avait pour objectif de « sécuriser les conditions dans lesquelles l’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie » (article 12).
Ainsi, si l’intention des promoteurs de la rupture conventionnelle était d’éviter tout contentieux, ce mode de rupture ne cesse cependant d’occuper les tribunaux. La question se posant le plus souvent en toile de fond étant celle de savoir si l’existence d’un différend entre l’employeur et le salarié était susceptible d’entraîner la nullité de la rupture conventionnelle.
A ce titre, il avait été établi par la jurisprudence que le conflit entre employeur et salarié ne saurait entraîner à lui seul la nullité de la rupture conventionnelle à moins que le salarié n’établisse que son consentement a été vicié lors de la négociation et de la conclusion de la convention.
Par quatre arrêts en date du 29 janvier 2014, la chambre sociale de la Cour de cassation vient préciser la construction de sa jurisprudence autour de la rupture conventionnelle du contrat de travail en précisant que des erreurs matérielles dans la rédaction de la convention ou un défaut d’information du salarié ne justifient l’annulation de la rupture conventionnelle homologuée que s’ils ont vicié son consentement.
Dans la première espèce (arrêt n°12-22.116), il a été établi que la convention de rupture conclue entre un employeur et un salarié fixe la date de rupture du contrat de travail qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation par l’autorité administrative. Par conséquent, le délai de quinze jours au plus tard suivant la première présentation de la notification de la rupture du contrat de travail dont dispose contractuellement l’employeur pour dispenser le salarié de l’exécution de l’obligation de non-concurrence a pour point de départ la date de la rupture fixée par la convention de rupture.
Dans la deuxième espèce (pourvoi n°12-24.539), la Cour de cassation juge qu’une erreur commise dans la convention de rupture sur la date d’expiration du délai de quinze jours prévu par l’article L 1237-13 du Code du travail ne peut entraîner la nullité de cette convention. Elle rappelle en effet que la nullité peut être prononcée seulement si elle a pour effet de vicier le consentement de l’une des parties ou de la priver de la possibilité d’exercer son droit de rétractation.
Dans la troisième espèce (pourvoi n°12-25.951), la Cour de cassation considère que le fait pour l’employeur de ne pas informer le salarié, avant toute rupture conventionnelle, qu’il peut prendre contact avec le service public de l’emploi en vue d’envisager la suite de son parcours professionnel n’affecte pas la liberté de son consentement à la conclusion de la rupture conventionnelle. Dans cette espèce, le salarié avait un projet de création d’entreprise.
Enfin, dans la dernière espèce, il a été jugé que le défaut d’information du salarié d’une entreprise ne disposant pas de représentants du personnel sur la possibilité de se faire assister, lors de l’entretien au cours de laquelle les parties conviennent d’une rupture conventionnelle par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative n’a pas pour effet d’entraîner la nullité de la convention de la rupture (pourvoi n°12-27.594).
Ainsi, le salarié qui entend contester la validité de la rupture conventionnelle doit démontrer l’existence d’un réel vice du consentement afin d’obtenir des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Favorables à l’employeur ces arrêts s’inscrivent dans la continuité de la volonté du législateur qui était celle de sécuriser la rupture conventionnelle afin de réduire les sources du contentieux relatif à la rupture du contrat de travail.