Les proches d’une personne peuvent s’opposer à la reproduction de son image après son décès, dès lors qu’ils en éprouvent un préjudice personnel
L’arrêt rendu le 1er juillet 2010 par la Cour de cassation vient clore le contentieux sordide relatif à la publication de photographies d’Ilan X, qui avait été torturé et tué après trois semaines de séquestration.
Les photographies, qui avaient été envoyées à sa famille pour motiver leur demande de rançon, représentaient la victime bâillonnée, l’ensemble du visage tuméfié, les poignets entravés, un journal coincé sous la poitrine et un pistolet braqué sur sa tempe. Ces photographies ayant été publiées sans l’autorisation de la famille dans le magazine Choc de juin 2009, la mère et les sœurs de la victime ont assigné le directeur de la publication ainsi que la société d’édition du magazine, pour voir constater l’atteinte à leur vie privée, ordonner le retrait de la vente du numéro et le versement d’une provision.
Les juges de la Cour de cassation ont confirmé accueillir la demande en rejetant le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt qui a ordonné l’occultation, sous astreinte, de toutes les reproductions de la photographie d’Ilan X et condamné les défendeurs au paiement de diverses sommes à titres de provision.
Dans la lignée de la jurisprudence selon laquelle les droits de la personnalité, au rang desquels le droit au respect de la vie privée ou le droit à l’image, s’éteignent avec le décès de la personne qui en est seule titulaire, la Cour de cassation permet aux proches du défunt de s’opposer à le reproduction de telles photographies, à le condition que ceux–ci subissent un préjudice personnel distinct.
Après avoir qualifié les photographies « suggérant la soumission imposée et la torture », d’attentatoires à la dignité humaine, la Cour de cassation retient que la publication constitue une atteinte à la mémoire ou au respect du au mort et, faisant un lien original, en déduit une atteinte à la vie privée des proches.
Considérant par ailleurs que ces photographies dénotent une « recherche de sensationnel », et qu’elles n’apportent aucun supplément d’information au public, les juges écartent la justification des nécessités de l’information, qui découle de la liberté d’expression et d’information visée à l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.