Faut-il informer le salarié qu’il peut demander la précision des motifs de licenciement ?
Réponse négative fournie sans ambiguïté par la Cour de cassation
Une salariée est licenciée pour faute grave, en raison de faits de harcèlement moral.
Elle saisit la juridiction prud’homale afin de contester son licenciement, dont elle estime que le motif, invoqué dans la lettre, est imprécis.
Au soutien de sa demande, elle avance notamment le fait que l’employeur a omis de mentionner, dans la lettre de licenciement, le fait qu’elle bénéficiait de la possibilité de demander la précision des motifs de licenciement, en vertu de l’article R. 1232-13 du Code du travail introduit par un décret du 15 décembre 2017.
Aux termes de ce texte, un salarié licencié peut demander à son employeur d’apporter des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, dans les quinze jours suivant la notification de celui-ci. A défaut d’en faire la demande, le salarié ne peut en principe plus se prévaloir d’une quelconque imprécision du motif de licenciement.
Or, en l’espèce, la salariée estime que le fait qu’elle n’ait pas demandé de précision des motifs dans le délai imparti n’était que la conséquence de l’omission de l’employeur d’indiquer qu’elle en avait la possibilité. Par conséquent, selon elle, cela ne devrait pas l’empêcher d’invoquer l’imprécision des motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
La salariée est déboutée par les juges du fond et se pourvoit en cassation.
La Cour de cassation ne la suit pas dans son raisonnement, et confirme l’arrêt d’appel.
Elle aurait pu se contenter de reprendre l’argumentation de la cour d’appel, qui avait contourné la question en jugeant que la motivation de la lettre de licenciement était suffisante et que la salariée ne pouvait prétendre à aucune indemnité.
Néanmoins, la Cour décide d’ajouter « qu’aucune disposition n’impose à l’employeur d’informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés ».
C’est la première fois que la Cour de cassation répond à cette question.
La solution semble parfaitement conforme à l’esprit de la loi. En effet, aucun texte ne prévoit une quelconque obligation d’information à la charge de l’employeur en la matière. C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation rejette le pourvoi, refusant d’imposer à l’employeur le respect d’une obligation que le législateur n’a pas entendu mettre à sa charge.
L’indication dans la lettre de licenciement de la possibilité, pour le salarié, de demander des précisions sur le motif de licenciement est donc purement facultative, malgré ce que peut laisser entendre le ministère du Travail dans un Questions-réponses datant de juillet 2020. En effet, l’information du salarié à ce propos figure dans les modèles de lettre de licenciement proposés par le ministère.
Néanmoins, ce dernier indique clairement que « la procédure de précision des motifs […] ne doit pas impérativement apparaître dans une lettre de licenciement » : elle n’a donc aucune valeur contraignante.
Cass. soc., 29 juin 2022, n° 20-22.220