Actions en justice d’un syndicat: le seul constat d’une violation de la loi cause nécessairement un préjudice à l’intérêt collectif de la profession, ouvrant droit à réparation.
La chambre sociale de la Cour de cassation est une nouvelle fois intervenue, dans un arrêt en date du 2 février 2022, afin de trancher la question du préjudice résultant de l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession.
Conformément à l’article L.2132-3 du code du travail, les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice.
Selon ce texte, ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent.
C’est dans ce contexte que la Cour de cassation a été saisie afin de savoir dans quelle mesure un syndicat devait démontrer l’existence et l’étendue du préjudice porté à la profession qu’il représente afin d’obtenir réparation.
En l’espèce, trois syndicats ont assigné devant le tribunal de grande instance des sociétés afin de contester la mise en œuvre par celles-ci d’un accord collectif instaurant, pour une catégorie de salariés, une convention de forfait.
A ce titre, les syndicats ont sollicité le paiement de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à l’intérêt collectif de la profession.
La Cour d’appel de renvoi, après une première décision de cassation, avait bien reconnu la violation de la loi par les sociétés intimées, mais avait débouté les syndicats de leur demande de dommages et intérêts, au motif qu’ils ne démontraient pas que l’irrégularité constatée leur avait causé un préjudice.
Les syndicats se pourvoient en cassation.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, selon un attendu rédigé comme suit : « en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté qu’il avait été définitivement jugé que la convention de forfait en heures (…) avait été mise en œuvre par les sociétés XX, de manière irrégulière à l’égard des salariés relevant des modalités « réalisation de missions », ce dont il en résultait un préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession, à qui il appartenait d’évaluer ce préjudice, à violé le texte susvisé »
Ainsi, le seul constat de l’application irrégulière d’une clause conventionnelle devait conduire la Cour d’appel à considérer qu’il y avait nécessairement eu un préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession, sans que les syndicats n’aient à le démontrer.
Cet arrêt se situe dans la lignée d’une jurisprudence constante selon laquelle la violation de la loi porte nécessairement atteinte à l’intérêt collectif de la profession. L’office du juge consiste donc uniquement à évaluer le préjudice subi et l’indemnisation subséquente à octroyer aux syndicats.
Cour de Cassation, Chambre sociale du 2 février 2022 n°D20-18.713