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2 février 2012

Rupture brutale de relations commerciales et réparation du préjudice d’un tiers

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Un tiers peut-il invoquer la rupture brutale d’une relation commerciale établie afin d’obtenir réparation du préjudice qu’il subit par ricochet ? Dans son arrêt du 6 septembre 2011, la chambre commerciale de la Cour de cassation juge par la positive sous la forme d’un attendu à portée générale : « un tiers peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la rupture d’une relation commerciale dès lors que ce manquement lui a causé un préjudice » (Cass. Com., 6 sept. 2011, n°10-11.975).

En l’espèce, un producteur avait choisi de faire assurer par une société française le fret et la gestion commerciale des commandes d’une société thaïlandaise, filiale de la société française. Constatant une altération des ventes sur le marché thaïlandais, le fournisseur a rompu ses relations commerciales avec la société française. Cette dernière, ainsi que sa filiale thaïlandaise pourtant tiers au contrat, ont assigné le fournisseur sur le fondement de la rupture abusive de relations commerciales établies aux fins d’obtenir réparation de leur préjudice. Les juges du fond ont accueilli ces demandes de condamnation en considérant notamment que la société filiale thaïlandaise était fondée à demander réparation de son préjudice sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. En effet, selon le requérant, l’article L. 442-6 du Code de commerce a seulement vocation à régir les relations entre partenaires commerciaux, et ne permet donc pas d’indemniser un éventuel dommage par ricochet, mais uniquement le dommage directement subi par la victime de la rupture abusive.

Par une décision publiée au bulletin, la Cour de cassation rejette le pourvoi dans sa totalité et confirme la position des juges du fond sur le bien-fondé de reconnaître au tiers le droit d’être indemnisé, sur le fondement délictuel, du préjudice qu’il subit lors d’une rupture brutale d’une relation commerciale. Cet arrêt constitue un revirement de jurisprudence puisque la chambre commerciale de la Cour de cassation jugeait auparavant que lorsque le distributeur n’était pas en mesure de démontrer « le moindre rapport commercial » avec le producteur, il ne pouvait se prévaloir des dispositions de l’article L.442-6 du Code de commerce relatif à la rupture brutale des relations commerciales (Cass. com., 3 novembre 2004, n° 02-17078).

Avec son arrêt du 6 septembre 2011, la chambre commerciale de la Cour de cassation applique au cas particulier des ruptures de relations commerciales établies le principe général qui a été posé par l’assemblée plénière le 6 octobre 2006, à savoir que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage » (Cass. Ass. Plèn., 6 oct. 2006, n°05-13.255).