Droit des marques: remise en cause de l’exception pour motif légitime
Par un arrêt du 17 janvier 2018, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a remis en cause l’exception pour motif légitime qui était encore en vigueur en droit des marques français (Com., 17 janvier 2018, n°15-29.276).
L’exception pour motif légitime venait tempérer le principe des articles L. 713-2 et L. 716-10 du Code de la propriété intellectuelle, selon lequel toute reproduction d’une marque pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement, ainsi que l’exportation de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, constitue un acte de contrefaçon.
En effet, en vertu de cette exception, la Cour de cassation considérait jusqu‘alors que la détention de produits revêtus d’un signe contrefaisant sur le territoire français ne caractérisait pas un acte de contrefaçon dès lors que les produits sur lesquels le signe contrefaisant était apposé étaient destinés à l’exportation vers des pays tiers dans lesquels ils étaient licitement commercialisés et qu’il n’existait pas de risque que ces marchandises puissent être initialement commercialisées en France (not. Com., 10 juillet 2007, n°05-18.571).
Dans son arrêt du 17 janvier 2018 Cour a souligné que cette exception n’était pas conforme au droit de l’Union européenne dans la mesure où elle « ne fait pas une application correcte du principe d’harmonisation ». En effet, « ni la Directive 89/104 du 21 décembre 1988, ni celles adoptées par la suite ne prévoient une telle exception ». En conséquence le maintien de l’exception pour motif légitime en droit français était contraire au droit de l’Union
La Cour de cassation en tire toutes les conséquences puisque, en l’espèce, sur le fondement de l’article 5§1 de la Directive précitée, et en faisant référence à la jurisprudence de la CJUE (v. not. CJCE 20 nov. 2001, n° C-414/99), elle considère que l’acte de contrefaçon est constitué dès lors que la marque litigieuse est apposée en France (territoire sur lequel elle bénéficie d’une protection), peu importe que les produits litigieux soient destinés à la Chine.
Les droits des titulaires de marques se trouvent ainsi renforcés par cette décision de la Cour de Cassation.