Hermès dénonce une atteinte à ses droits de propriété intellectuelle face à la vente de sacs Birkin sous forme de NFT
Après « Baby Birkin », un NFT unique créé en collaboration avec le peintre Éric Ramirez, l’artiste digital Mason Rothschild se lance dans un nouveau projet intitulé « MetaBirkins » comprenant 100 déclinaisons du célèbre sac Birkin de la Maison de luxe Hermès disponibles sous forme de NFT. La Maison Hermès, qui n’a pas encore investi ce marché, dénonce une atteinte à son image de marque et à ses droits de propriété intellectuelle.
Le NFT « Non Fongible Token » est un jeton numérique non fongible qui repose sur la technologie Blockchain, qualifiée d’inviolable. Ce jeton désigne un fichier numérique auquel est attaché un certificat d’authenticité, permettant au propriétaire de garantir la propriété exclusive de l’actif numérique qu’il vient d’acquérir le plus souvent via de la cryptomonnaie. De plus en plus de secteurs sont touchés par ce phénomène, tels que l’art, la musique, les jeux vidéo ou encore la mode.
Les ventes de la collection « MetaBirkins »créée par Mason Rothschild sur la page dédiée de la marketplace « Opensea » ont déjà accumulé plus de 800.000 dollars. Cependant, un représentant d’Hermès a affirmé dans le Financial Times que « Hermès n’a pas autorisé ou consenti à la commercialisation ou création de son sac Birkin par Mason Rothschild dans le métavers »[i] (monde virtuel évolutif) et dénonce une atteinte à ses droits de propriété intellectuelle. Selon la maison de luxe, ces 100 NFT seraient des faux produits de la Maison Hermès dans le métavers. Aucune action en justice ne semble avoir été intentée mais les sacs Birkin n’apparaissent plus disponibles sur la page du site Opensea. Cette affaire met donc en exergue les difficultés juridiques posées par les NFT au regard du droit de la propriété intellectuelle.
Juridiquement, le NFT est un certificat d’authenticité attestant de la paternité et intégrité de l’œuvre. Ce jeton n’est pas considéré comme le support de l’œuvre car il ne représente qu’une connexion menant à celle-ci. Le fichier numérique comprenant l’œuvre en est son support. Grâce à la Blockchain, il est possible d’inscrire un smart contract qui prévoit la codification d’une œuvre et la cession des droits d’auteur y afférents. En cas de silence du contrat, l’acquéreur n’est réputé titulaire que du jeton et non des droits attachés à l’œuvre. Par ailleurs, le droit de suite s’applique également et l’auteur sera rémunéré à chaque transmission, facilement traçable grâce au système de la Blockchain.
De nombreux artistes s’emparent de modèles existants afin d’en créer un NFT. Cependant, une telle pratique pourrait porter atteinte aux éventuels droits d’auteur, de dessin et modèle et de marque du titulaire de droit. S’agissant du sac Birkin, le fichier contenant l’image du sac constitue une reproduction numérique commercialisée de ce dernier, sans aucune autorisation. Néanmoins, il n’existe pas à ce jour de jurisprudence sur le sujet ni de réglementation spéciale. Enfin, quand bien même ces NFT serait constitutifs d’une contrefaçon, il serait impossible de les détruire de la Blockchain après l’enregistrement d’une transaction, celle-ci étant infalsifiable.
Un nouveau règlement européen sur les marchés de crypto-actifs nommé « MiCA » est en négociation, mais il n’est pas certain que celui-ci se penche sur les questions de propriété intellectuelle.
[i] “Hermès did not authorise nor consent to the commercialization or creation of our Birkin bag by Mason Rothschild in the metaverse. These NFTs infringe upon the intellectual property and trademark rights of Hermès and are an example of fake Hermès products in the metaverse”.